La fusion entre l’UCLouvain et l’Université Saint-Louis de Bruxelles, quel impact pour les historien.nes ? Interview avec Éric Bousmar

-Xavier Dabe, UCLouvain – Saint-Louis Bruxelles

Depuis septembre 2023, l’UCLouvain a fusionné avec l’Université Saint-Louis, autrefois Facultés universitaires de Saint-Louis, située à Bruxelles sur le Boulevard du Jardin botanique. Une fusion qui a parfois provoqué des débats ou des critiques, notamment dans la presse d’opinion. Mais quelles en sont les conséquences pratiques pour la recherche et l’enseignement de l’histoire du point de vue du site Saint-Louis ?

Éric Bousmar a fait des va-et-vient entre les deux sites dans sa carrière. Ancien étudiant de ce qui était encore l’UCL à Louvain-la-Neuve, diplômé complémentaire à la KU Leuven, il a été Aspirant FNRS à Louvain-la-Neuve avant d’être engagé comme assistant à Saint-Louis. Aujourd’hui codirecteur du Centre de recherches en histoire du droit, des institutions et de la société (CHRIDI) du site Saint-Louis, mais également Professeur d’histoire médiévale et de méthodologie de l’histoire, il a accepté de tenter de débroussailler cette thématique, très actuelle et donc sujette à de futures évolutions.

 

Vous êtes assistant et chercheur depuis 1997 à Saint-Louis. Quelles sont les principales évolutions qu’a connues l’université depuis votre arrivée, notamment dans le domaine de l’histoire ?

D’abord, il y a eu des évolutions de type institutionnelles, liées aux réformes successives de l’enseignement et d’abord celle de Bologne, qui a quand même été, dans le cadre des Facultés universitaires de Saint-Louis, assez fondamentale, puisqu’à partir du moment où le premier cycle passait de deux années de candidature à trois années de bachelier, il fallait évidemment créer une troisième année. Cela a eu un impact considérable pour une institution comme la nôtre à l’époque, on n’a pas bénéficié de moyens supplémentaires bien entendu, mais on a dû créer une année, qui permettait un approfondissement supplémentaire pour les étudiants, donc on s’est dit « on ne va pas diluer les candidatures sur trois ans, mais considérer que cette troisième année devient l’équivalent de ce qu’était la première licence », du second cycle. Il s’agissait de pouvoir apporter des cours plus avancés, ou des cours de sciences auxiliaires qu’on n’enseignait pas en candidature et qu’on a intégrés dans notre programme de bachelier. Donc cela a été un moment assez important en termes de réflexions sur le programme, sa finalité, la cohésion des programmes d’enseignement qu’on organisait. Cela ne s’est pas fait en vase clos, car on était à l’époque dans une logique d’harmonisation des programmes de premier cycle donc on a eu toute une série de concertations interuniversitaire pour mettre au point les minima doyens, c’est-à-dire le nombre de crédits qui doivent, dans tel secteur de la formation, nécessairement se retrouver dans un programme. Du point de vue du programme d’histoire, je pense que c’est la première évolution significative.

La seconde est très certainement l’introduction toute récente, mise en place l’an dernier, d’un bachelier de type bilingue français-anglais, qui s’ajoute au bachelier « ordinaire » en français. On a donc un bachelier français-anglais où un nombre significatif de cours sont donnés en anglais, y compris des séminaires.

Accessoirement par rapport à cela, on avait fonctionné pendant longtemps avec un programme de candidature en histoire puis de bachelier en histoire organisé en deux filières, une filière « sciences de la société contemporaine » et une filière « lettres, société et civilisation. » L’idée étant d’offrir un paquet de choix de cours différent selon les deux filières. La première était une filière où les cours de sciences sociales portant sur le contemporain étaient plus présents que dans l’autre filière, en dose renforcée. L’idée étant que cette filière pouvait préparer des étudiants à bifurquer vers une autre formation (communication, sciences politiques par exemple). Tout cela, on l’avait fait en pionnier dans les années 1990, avant qu’on ne parle de majeure et de mineure. Finalement, on a été rattrapés par la logique des majeures et mineures. On offrait une possibilité plus intéressante que les majeures et mineures parce que le nombre de cours variant était plus important avec le système des filières, on est limités à un certain nombre de crédits pour une mineure. Mais ça devenait compliqué à gérer et surtout à visibiliser dans un contexte où tout le monde parlait de majeures et mineures. On a donc renoncé à cette organisation en deux filières pour créer de manière plus modeste, plus classique, des mineures au sein du programme de bachelier en histoire.

 

L’Université Saint-Louis a une histoire assez longue. Est-ce que sa fusion avec l’UCLouvain ne va pas remettre en cause certaines de ses spécificités institutionnelles ou pédagogiques ?

Alors, dans l’immédiat, non, pour ce qui est de l’organisation et des spécificités pédagogiques, dans la mesure où les principes qui ont mené à la fusion sont ceux du maintien des formations sur les différents sites, là où ils existaient, et de l’autonomie des différents sites dans l’organisation de ces formations. L’idée est qu’il est intéressant pour l’UCLouvain d’offrir une formation d’histoire à Louvain-la-Neuve et une à Bruxelles, parce qu’au niveau du premier cycle, ce n’est pas le même public à qui ces formations vont s’adresser.

De manière plus concrète, il y a des principes institutionnels qui garantissent l’autonomie en termes d’organisation des programmes, donc on continue à donner les mêmes cours, à les organiser de la même manière ou à les faire évoluer de la même manière qu’on l’aurait souhaité. Il n’est pas question de décalquer par exemple le programme d’un site sur l’autre. Et, d’autant plus que dans un premier temps du moins, ce qu’on appelle la « phase de transition » qui dure minimum trois ans, chaque site va conserver des facultés distinctes avec deux doyens, donc deux doyens de Philosophie et lettres, et notre programme à Saint-Louis dépend du doyen de la Faculté Saint-Louis, celui de Louvain-la-Neuve dépend du doyen de la Faculté FIAL de Louvain-la-Neuve. Il y a donc vraiment, en termes institutionnels, des outils pour maintenir cette continuité. Après, des évolutions sont toujours possibles à long ou moyen terme, mais à court terme l’idée est de continuer à faire ce que l’on faisait.

 

Vous avez déjà répondu un peu à la question suivante : comment garder le cachet Saint-Louis dans ce contexte de fusion ?

Je pense qu’un cachet, c’est quelque chose tributaire d’un moment et qui évolue nécessairement. Ce qu’on appelait « l’esprit Saint-Louis » dans les années 1920 ou 1930 n’a rien à voir avec ce qu’a pu être le cachet Saint-Louis autour de l’an 2000. Cela dépend évidemment aussi de l’évolution des équipes d’enseignants eux-mêmes et de la manière dont le flambeau passe peut-être des ainés aux plus jeunes. Il est certain qu’il y a aussi des éléments de type structurel qui vont renforcer le maintien d’un cachet Saint-Louis, à savoir une relativement plus petite taille à la fois des équipes présentes sur le site, mais aussi des cohortes d’étudiants, en tout cas en histoire, et donc de facto l’approche est différente : un contact peut-être plus facile par la force des choses avec les étudiants ou entre étudiants et enseignants, et d’autre part, aussi, une polyvalence plus grande par la force des choses peut-être au sein de l’équipe d’enseignants, qui sont essentiellement pour ne pas dire exclusivement chargés d’enseignement de premier cycle (car dans l’histoire longue de Saint-Louis, il s’agit d’un site où l’on enseigne essentiellement des programmes de premier cycle universitaire). Le professeur de Saint-Louis est nécessairement dédié prioritairement à des enseignements de premier cycle, en partie généralistes et avec une vocation introductive pour de jeunes étudiants, qui sont déjà relativement avancés quand ils arrivent en troisième année bien sûr, mais cela reste une optique différente que celle où l’on doit discuter avec des étudiants de master. Ce n’est pas tout à fait le même type de pédagogie ou d’étape dans le parcours des étudiants. Cette particularité, qui relève de contraintes structurelles, fait aussi qu’il y a un cachet particulier qui, au fil du temps, se soit développé dans la manière d’enseigner.

Pensez- vous qu’il faut considérer cette fusion dans la logique des « réseaux » de l’enseignement en Communauté française, d’un clivage philosophique qui bipolarise l’enseignement supérieur francophone, comme le dénonçaient récemment encore les universités de tendance « laïques » ?

La question a été posée au moment de la fusion, c’est quelque chose qui a fortement divisé la communauté universitaire de Saint-Louis à l’époque, avec des partisans d’une logique de coopération régionale, et donc clairement des rapprochements intrabruxellois, et d’autres qui optaient pour une autre solution. De ma perception des choses, le débat interne n’était pas tellement pour des collaborations confessionnelles ou non confessionnelles. Je reste prudent, en tant que simple enseignant on n’a pas accès à toutes les coulisses ni à toutes les conditions de négociation, mais le débat était celui de la forme de synergie la plus efficace ou la plus pertinente pour répondre aux besoins identifiés comme ceux du site à ce moment, à savoir pouvoir s’appuyer sur une structure plus forte, notamment en termes de soutien administratif, de soutien technique également, en termes de masse critique à certains égards. Notamment, pour faire simple, quand il s’agit de pouvoir envoyer des représentants de l’Université dans telle commission, de charger un membre académique de l’Université de telle mission qui s’impose, etc. Dans une structure dix fois plus grande, c’est plus facile de répartir toutes ces tâches sur les membres du personnel et de trouver des personnes intéressées et compétentes pour le faire, tandis que dans une petite structure, c’était devenu extrêmement lourd, car, pour le dire platement, c’était toujours sur les mêmes que retombaient ces charges. Et donc, la perspective faite et ce que les promoteurs d’une fusion mettaient en avant, c’était qu’à terme, les énergies seraient épuisées et qu’il ne serait pas possible de continuer avec le nombre de missions supplémentaires qui s’imposaient aux universités, parfois de simples contraintes de type « rapportage institutionnel » imposées par des intervenants extérieurs.

Donc, de la même manière dont je l’ai vécu, je pense que ce débat autour de la fusion n’était pas posé en termes confessionnels, cathos contre les autres, c’était une réflexion en termes de culture institutionnelle et de possibilités offertes par le partenaire. Effectivement, en termes de culture institutionnelle, beaucoup ont fait valoir qu’il y avait des liens assez forts entre Louvain et Saint-Louis, des liens historiques, mais ça n’a jamais été non plus une réalité exclusive. Très concrètement, dans le programme d’histoire, on a un nombre significatif de doctorants qui sont des anciens de l’ULB que nous avons recrutés, inversement des anciens de Saint-Louis ont été engagés à l’ULB ou à la VUB, en histoire ou en droit ou dans d’autres disciplines. Donc, les relations et collaborations entre communautés universitaires restent fortes, me semble-t-il, je ne vois pas la fusion comme une volonté d’exprimer ou de renforcer un clivage. Je pense que ceux qui, à un moment donné, ont été hostiles à la fusion ont pu le percevoir comme cela.

Vous prenez maintenant votre casquette de chercheur historien. En quoi pour vous, ce processus de fusion a un peu, ou pas, impacté votre travail au quotidien ?

Premièrement, je dirais que la fusion a été la fin d’une période d’incertitude. Pendant presque cinq ans, quand la fusion a été décidée, on a dû attendre, car pour des raisons politiques, il y a eu un blocage de cette fusion, et donc d’année en année on attendait et on nous promettait (le peut-être de) la fusion. C’est quelque chose qui, pour développer des projets, a été très handicapant, car c’est difficile de savoir comment se situer, voir quelles stratégies de partenariat privilégier. Un seul exemple : lorsque vis-à-vis du FNRS on introduit un projet pluriuniversitaire, cela fonctionne bien avec des partenaires de deux universités différentes. À partir du moment où deux universités fusionnent, ça ne fonctionne plus. Moi, j’ai eu la chance d’introduire un projet juste avant que la fusion ne soit décidée, et donc c’est un projet qui est passé, mais j’ai un collègue qui n’a pas pu introduire de projet avec ses partenaires de l’UCLouvain, car vu que la fusion était décidée, il s’agissait d’une réalité mono-universitaire et non plus pluriuniversitaire. Or pour le FNRS ce n’est pas simplement favoriser les collaborations interuniversitaires, c’est aussi une question de budget. Un projet de type PDR pluriuniversitaire a un budget plus important que de type mono-universitaire. Dans ce cas-là, dans la phase de basculement, la fusion a été un obstacle, en réalité c’était une épée de Damoclès qui restait pendante. Je dis cela pour expliquer que l’architecture des partenariats était quand même importante et qu’on a été un peu handicapés par cette incertitude pendant longtemps. Maintenant, c’est terminé et je pense que ça va être beaucoup plus clair aussi. C’est certainement la première chose, c’est un peu un soulagement, quoi qu’on pense de la fusion, quels que soient les avantages ou les inconvénients qu’on y voit. Le fait d’avoir fusionné est mieux que l’attente d’une fusion incessamment reportée. Je pense que ceux qui ont œuvré pour retarder cette fusion n’ont rien fait pour favoriser le développement des universités à Bruxelles et quelles qu’elles soient, car on travaille en partenariat avec toutes les universités.

Pour le reste, dans l’immédiat, c’est encore un peu tôt pour dire si mon travail en tant que chercheur est directement ou non impacté. On a de nouvelles relations évidemment avec le service d’administration à la recherche, donc ce sont des choses qui se font petit à petit, mais en même temps, comme je l’ai dit, la fusion est basée sur le principe d’une autonomie assez grande du site Saint-Louis au sein de l’UCLouvain, ce qui implique aussi qu’on ait maintenu à Saint-Louis un Service d’administration à la recherche, et donc on a un soutien logistique de proximité pour les équipes de chercheurs, sans devoir nécessairement recourir à des services ou à des personnes qui se trouvent à une heure de train de la Faculté où l’on travaille.

Maintenant, en tant que Professeur, quels sont les impacts éventuels que vous avez repérés ? Ou bien, la vie quotidienne continue ?

Je pense que, pour l’essentiel, la vie continue, en tout cas pour le professeur qui assure ses cours et qui rencontre ses étudiants. Il y a bien sûr une série d’adaptations, mais, qui sont finalement vite rencontrées ou surmontées : on change de logiciel pour l’enregistrement des cotes d’examen, on a une nouvelle version de la plateforme Moodle, mais il fallait de toute façon l’updater. On a désormais une carte de bibliothèque qui permet de rentrer directement sur le site de Louvain-la-Neuve sans devoir demander l’ouverture au comptoir. Voilà, à nouveau, dans la mesure où l’on conserve une faculté autonome sur le site, toutes les questions relatives à l’organisation de l’enseignement se traitent sur le site, comme avant. Les questions relatives aux jurys d’examen se traitent sur le site, comme avant. Donc, dans l’immédiat, de ce point de vue, il n’y a pas d’impact ou de modification.

Pour vous, pensez-vous que cette fusion est porteuse de bénéfices pour les historiens et les historiennes de Saint-Louis ? Quels sont les points positifs qui pourraient en ressortir dans le cadre de l’enseignement ou de la recherche en histoire ?

Je pense que pour tous les historiens de l’UCLouvain, ceux du site de Saint-Louis ou de Louvain-la-Neuve, il y a une volonté de faire des choses ensemble. On est des collègues au sein d’une même maison, il serait donc trop bête de s’ignorer. Il y a des discussions en cours pour développer des synergies, que ce soit sur le plan de la recherche ou de l’enseignement, mais je pense que tout cela va aller à son rythme, sans précipitation. On est déjà à la moitié de l’année académique et concrètement, rien n’a véritablement bougé. Mais c’est normal dans la mesure où l’enseignement est structuré en facultés qui sont séparées, la recherche est aussi structurée en instituts de recherches distincts. C’est là aussi une spécificité de l’UCLouvain par rapport à d’autres universités, enseignement et recherche sont découplés, les doyens et les facultés s’occupent de l’enseignement, les présidents des instituts de recherche s’occupent de la recherche, et c’est en leur sein que sont hébergés les centres de recherche. À Louvain-la-Neuve, les historiens sont répartis sur deux ou trois instituts de recherches différents. À Saint-Louis, pour les besoins de la fusion et des infrastructures, on a créé un institut IRIS-L. Donc, là aussi, dans un premier temps, chacun doit d’abord trouver ses marques dans ces structures, et ensuite, voir comment collaborer dans une logique intersites ou multisites. Dans ce cas, la structure obligatoire en instituts ne facilite pas nécessairement les choses, puisque du point de vue de la recherche, dans la logique UCLouvain et vu la dispersion des historiens entre divers instituts, ces logiques, si elles veulent s’institutionnaliser, doivent nécessairement devenir des logiques interinstituts. C’est un peu compliqué pour des gens comme nous qui sont des novices dans ce type de structure. Voilà les difficultés.

Les opportunités sont nombreuses évidemment : on peut monter des projets plus ambitieux en travaillant avec des collègues qui ont des compétences complémentaires par rapport aux nôtres, dans des domaines moins représentés sur le site de Saint-Louis. Je pense typiquement à tout ce qui est de l’ordre de l’archéologie, ou pour le contemporain, à l’histoire de l’art et des cultures visuelles. Nous n’avons pas sur le site Saint-Louis de département d’histoire de l’art et on ne peut pas en avoir non plus, puisque la fusion s’accompagne d’un moratoire d’au moins cinq ans sur toute nouvelle création de formation, c’est la concession qui a dû être faite aux opposants à la fusion. Donc, des collaborations de ce type, qui n’étaient pas possibles au sein de la même institution, le deviennent désormais grâce à des logiques multisites. Il y a par ailleurs pas mal d’enseignants du site Saint-Louis qui ont été formés à l’UCLouvain, et il y a pas mal d’enseignants du site Louvain-la-Neuve qui ont été formés à Saint-Louis. Cela crée aussi, je dirais deux équipes par site qui se sont rencontrées régulièrement, qui se connaissent assez bien. Donc, je ne doute pas qu’à l’avenir, on trouve toute une série de possibilités de développer des projets et des collaborations, en termes de projets de recherche (chercher des financements communs), en termes sans doute plus modestes d’organisation de séminaires communs, de journées d’étude communes, de colloques tenus en commun.

Sur le plan de l’enseignement, les rapprochements sont possibles aussi bien entendu, mais il y a toujours la difficulté que les questions sont structurées sur deux Facultés séparées. Ce n’est pas nécessairement si simple d’échanger des cours ou de nommer quelqu’un sur deux sites alors qu’il n’était que sur un au départ. C’est possible, mais évidemment cela doit entrainer des questions d’ordre institutionnel et des accords, et aussi des disponibilités des personnes à moduler leur temps de travail et les endroits où ils enseignent. C’est de l’ordre du possible, mais pas du tout de l’ordre du nécessaire voire de l’immédiat. Ce qui est plus à l’ordre du jour, c’est aussi une demande des collègues de Louvain-la-Neuve, c’est que les collègues de Saint-Louis soient plus fréquemment et régulièrement impliqués dans des directions ou des jurys de mémoire. Ce n’est pas une nouveauté pour Saint-Louis, beaucoup d’entre nous ont déjà siégé dans des jurys ou codirigé des mémoires. Mais dans la mesure où l’on n’organise pas de master en histoire, on n’est pas directement responsables de mémoires en histoire. C’est toujours à titre d’invités qu’on avait pu encadrer des mémoires ou siéger dans des jurys, à Louvain-la-Neuve ou d’ailleurs à l’ULB où plusieurs d’entre nous ont siégé régulièrement ces dernières années. C’est l’occasion de rappeler qu’il n’y a pas d’exclusive institutionnelle et qu’un type de collaboration n’en exclut pas un autre. Je pense que oui, dans une nouvelle université, il y a moyen de travailler en commun, et je pense que les choses se feront petit à petit.

Comment l’Université et votre centre de recherche ont-ils préparé cette fusion d’un point de vue académique, pas technique ? Un rapprochement préalable entre chercheur.ses a-t-il été réalisé ? Qu’a-t-il apporté à votre centre de recherche ?

Préparation, c’est un grand mot, puisque justement, comme je l’ai dit, la fusion s’est fait attendre pendant longtemps. On l’a attendue pendant cinq ans, et pendant cinq ans c’était difficile de préparer ou d’organiser quelque chose, car d’année en année, le contexte évoluait. Par contre, on a eu une série d’occasions, pas nécessairement liées avec la fusion, de collaborer avec des homologues à Louvain-la-Neuve dans plusieurs centres de recherche. Il est évident que ces collaborations vont se retrouver potentiellement renforcées par le fait d’appartenir à une même institution. C’est le cas en termes de collaboration individuelle. C’est le cas aussi peut-être de manière plus appuyée avec certaines équipes de recherche de Louvain-la-Neuve dont les thématiques recoupent plus directement celles de notre centre de recherche. Donc, en termes de recherche collective, le CHRIDI est un centre qui se profile comme un centre d’histoire du droit, des institutions et de la société. Un tropisme sur l’histoire politique et institutionnelle et sur l’histoire du pouvoir est très important dans notre centre de recherche depuis sa fondation en 1992, qu’il faut comprendre dans une approche interdisciplinaire : on n’est pas seulement un centre d’historiens, il y a des collègues juristes et juristes historiens du droit dans notre centre de recherche. C’est cette spécificité d’avoir des chercheurs émanant des deux facultés, comme on dit souvent en France, des historiens de faculté de Lettres et des historiens de droit de faculté de Droit. On a évidemment, avec les centres et équipes de recherches de Louvain-la-Neuve qui s’occupent de l’histoire du droit, des relations privilégiées, et des contacts ont été pris évidemment. On est aussi allé jusqu’à organiser, déjà, à la veille de la fusion, le 25 mai 2023, une journée intercentres avec les collègues du Centre d’histoire du droit et de la Justice, et les collègues d’histoire du droit attachés à la faculté de Droit et à l’institut JUR-I de l’UCLouvain. Une journée de rencontre où chaque équipe a présenté ses projets de recherche, ses perspectives, où chaque chercheur s’est présenté. Là, l’expérience a été extrêmement concluante, car c’est quelque chose qui montre qu’on peut attendre des choses positives dans le cadre d’un rapprochement dans la fusion. Il y a des petits pas, très concrets, qui ont été pris. Par exemple, le fait d’intégrer dans la newsletter de notre centre de recherches les informations relatives aux autres équipes, et de diffuser notre newsletter à l’ensemble des membres des trois équipes. L’idée a été lancée aussi de renouveler le rendez-vous sous forme d’une série de séminaires intercentres. Voilà un exemple concret de synergie à titre collectif entre équipes de recherche qui respecte l’autonomie et la tradition de chaque équipe. Il n’est pas question de mettre tout le monde ensemble, on est sur différents instituts, différentes facultés, différents sites, pour reprendre les nouvelles nomenclatures de l’UCLouvain. Mais, quand il le faut, on sait se retrouver sur l’île au milieu du lac pour avoir des activités communes. Se rencontrer sous forme de séminaire, de discussions, c’est un premier pas évidemment vers des collaborations qui peuvent être plus poussées, devenir des cotutelles de thèse ou de mémoire (copromotion en fait, vu qu’il s’agit d’une même université), ou bien montage de projets à introduire auprès du FNRS ou d’autres bailleurs de fonds. Voilà comment, petit à petit, les choses se mettent en place, et comment on peut générer de nouvelles dynamiques. Cet exemple n’est pas exclusif, les circonstances on fait que l’on s’est retrouvés entre historiens du droit et des pouvoirs, mais l’idée est clairement présente et partagée aussi à Louvain-la-Neuve d’avoir le même type de rencontre avec les autres historiens ou de manière plus générale, entre historiens. Et de même, c’est sur la table, des discussions autour des questions d’enseignement auront certainement lieu dans les deux à trois années qui viennent, entre collègues enseignant l’histoire des deux sites, c’est inscrit dans les astres et cela se fera petit à petit.

-Xavier Dabe, UCLouvain – Saint-Louis Bruxelles

Contacteer ons

Zin om mee te werken aan een volgend nummer van Contemporanea?
Dat kan via onderstaande link